
MARION GRAUX NOUVELLE POTERIE
Photographie de Marion Graux © Anne-Claire Héraud
Photographies de l'atelier © Saint Louis Vision
Elle est une pionnière dans le renouveau de la céramique. Marion Graux crée des objets destinés à la table et consacre sa vie à son métier de potière qui lui procure un plaisir évident. Elle nous reçoit dans son atelier fraîchement installé dans la ravissante cité morbihannaise de Port-Louis. Ici, tout est beau, juste, utile. Une boutique-atelier où l’on se sent comme à la maison, où tout fait sens.
Peux-tu te présenter ?
Je m'appelle Marion Graux et je suis potière depuis 15 ans. Après 20 ans passés à Paris, je vis désormais à Port-Louis en Bretagne.
Peux-tu retracer ton parcours ?
J'ai fait des études de mode, puis j'ai été assistante au magazine Elle. Et après quelques années en tant que pigiste, j'ai décidé de me former à nouveau. J'ai préparé et passé un CAP céramiste à l'âge de 30 ans. À partir de là, je me suis installée à mon compte et je me suis spécialisée pour fabriquer de la vaisselle pour les chefs et les restaurants.
Pourquoi avoir choisi la céramique ?
Pour être en mesure de fabriquer de la vaisselle, des objets du quotidien, des pièces pour la table. C’est ça qui me fascinait, me passionnait, être moi-même fabricante de ce décor que j'affectionne particulièrement depuis toute petite. Le moment de cuisiner, le moment du repas, le moment de manger sont pour moi vraiment les meilleurs. Et puis, je trouve que c'est un vrai endroit de partage, de transmission. La cuisine, c'est ma pièce préférée.
D’ailleurs qu’elle est selon toi la différence entre la poterie et la céramique ?
Le potier est céramiste, mais le céramiste ne l'est pas forcément. Le potier fabrique des contenants à fonction utilitaire, de la vaisselle par exemple, ce qui n'est pas forcément le cas du céramiste. Donc je me définis plutôt comme potière, je me retrouve bien là-dedans.
Tu fais partie des potières pionnières du renouveau de la pratique, que penses-tu de l’engouement pour la céramique ?
C'est vrai qu'il y a 15 ans quand je me suis formée le métier n’était pas autant dans l'air du temps qu'aujourd'hui. C'était c'était plutôt singulier, pas loin d'être l'équivalent d'élever des chèvres dans le Larzac. Petit à petit, ça a déclenché des passions. Aujourd'hui, je pense qu'on est tous en quête d'un métier qui a du sens. C’est sans doute cette quête de sens qui est à l'origine d'autant de vocations pour les métiers manuels. Je trouve que cet engouement est important parce qu’il permet de faire comprendre aux gens que les objets qui sont faits à la main dans des petits ateliers en France ont une valeur différente que la plus jolie pièce de chez Ikea par exemple. On est vraiment dans cette incarnation des objets fabriqués comme au temps de l'Antiquité, que la modernité n'affecte pas, n'éclabousse pas. Ce sont ces objets qui deviennent des gardiens d'un temps qu'on ne peut pas réduire, d'une authenticité non trafiquée. Et ça, ça me plaît beaucoup.
Pourquoi créer de tes mains est-il important pour toi ?
Créer de mes mains est très important pour moi. J'ai l'impression que c'est comme un langage pour moi, c'est mon langage. J'ai cherché l'endroit dans lequel j'allais pouvoir un peu me déployer, m’exprimer et ma recherche m'a amené à la terre. C'est très intuitif, spontané, c'est une source de joie inépuisable et ça me donne vraiment confiance en l'avenir de savoir que j'ai cet espace à moi.
Tu as choisi de déménager à Port-Louis en Bretagne et d’y installer ton atelier, comment ce déménagement s’est-il opéré ?
Il y a un an et demi, on a décidé de quitter Paris pour vivre à Port-Louis où j’ai pu installer mon atelier et continuer à développer mon activité de potière. C'est vrai que ce changement était vraiment animé par l'envie d'une vie plus douce, plus calme, plus sereine. Et puis aussi une envie d’ouvrir une nouvelle page de vie. On a adoré vivre à Paris, notre vie où on a fait nos enfants, où on a vrombit de toute l'énergie de la ville. Et aujourd'hui, on veut un nouveau plateau de jeu avec d'autres saveurs, d'autres découvertes, et de pas se sentir contraint, obligé d'avoir la vie qu'on a choisie en premier lieu. On peut aussi la changer et relancer complètement les dés. Donc ça, c'est un vrai plaisir. Il n'y a pas un jour où on regarde en arrière, le changement est radical et c'est formidable.
Quelles sont tes sources d'inspiration ?
La mer, les rochers, le sable, l'eau sont une nouvelle source d'inspiration. J'ai un rapport à l'esthétisme qui peut être très émotionnel. Ça peut me renverser, me faire pleurer ou me plonger dans une excitation totale. Ça ne se commande pas. Je trouve qu'il y a des harmonies de couleurs, de formes, des lignes qui tout d'un coup forment une perfection ou une douce harmonie. Selon moi, l'esthétisme est lié à l'écoute de son intuition. Ce qui provoque une émotion, c'est la beauté et elle est évidemment propre à chacun, personne n'a raison ou tort.
Comment décrirais-tu ton travail ?
Ce n’est pas un exercice facile pour moi que de définir mon travail mais je dirais qu’il est à la fois brutaliste et doux. Je crée des objets pour qu’ils puissent habiter ma maison avec harmonie. J’ai l’espoir que ça puisse plaire aux autres mais je le fais avant tout pour moi. J’essaye de faire en sorte que le geste soit le plus apparent possible. Je travaille en amont la terre, les formes, les teintes, les émaux puis le geste est comme une danse.
Quels sont tes projets à venir ?
Je n’ai pas de projet immédiat, j'ai l’impression qu’on vient d’arriver en Bretagne. J’ai envie de rester là, de prendre mes aises, de me rouler dans mon confort. Je travaille depuis de longs mois sur un ex-libris avec Morgane Rospars, un motif sirène qui sera placé dans le fond d’une coupelle, comme un souvenir signé Port-Louis.
Pour plus d’informations sur le travail de Marion Graux, rendez-vous sur www.mariongraux.com et dans son atelier 18 grande rue, 56290 Port-Louis.

